Laurel Dovich

LES CARRIÈRES EN TECHNOLOGIE ET LA FOI

COMBLER LE GRAND FOSSÉ

Les carrières en technologie et leur formation préparatoire sont habituellement considérées comme « séculières ». Elles ne sont pas favorablement comparées aux « appels spirituels » des pasteurs, employés de l'« œuvre» ou enseignants qui portent l’aura d’avoir la capacité d’influencer spirituellement les autres. Les carrières en technologie ne sont pas considérées comme des vocations d’aide au même titre que les métiers médicaux, le travail social et les professions en intervention d’urgence qui cadrent bien avec le dogme chrétien du service. Ces carrières ne sont pas piégées sous les projecteurs des débats religieux sur l’évolution, la littérature appropriée (fiction contre non fiction) ou l’éthique des affaires1, et elles ne sont pas non plus typiquement associées à des défis à la foi. Les vocations technologiques ne seraient-elles pas des occupations légitimes dans le cadre d’« un appel divin » ? Auraient-elles, en fait, un lien avec la foi ?

Les adventistes, contrairement aux Amish, n’ont jamais été anti-technologie. Nous voyons que dans la Bible l’usage de la technologie a sa place : de la fabrication d’outils (Genèse 4.22 ; Ésaïe 2.4), aux instructions directes données par Dieu de construire une arche (Genèse 6. 14-16), à l'utilisation par Dieu de la technologie construite par l'homme comme lieu d'habitation parmi nous (Exode 25.8), à l'utilisation de bâtiments par le Christ pour des illustrations (Matthieu 7. 24-27, Luc 13.4 ; 14.28-30). Il semble claire que Dieu voulait que l’on fasse et utilise des outils – ce qui est dans le cadre des carrières technologiques. Cependant, pendant toute mon éducation adventiste (de l’élémentaire à l’universitaire), les cours liés aux technologies n’ont jamais été associés à une expérience religieuse. Ils étaient enseignés comme des sujets séculiers sans aucune affiliation avec notre foi chrétienne.

On pourrait bien sûr avancer que les lois de la physique et des mathématiques sont à la base des conceptions technologiques, lois que Dieu a créées et qu’il tient en place. Par contre, je dirais que les carrières technologiques ont beaucoup plus de liens avec notre foi qu’on ne l’imagine généralement, et nous devrions encadrer spirituellement nos étudiants dans ces domaines. Mais comment combler l’écart apparent entre les carrières en technologie et la foi ?

Une revue de la littérature dans mon domaine technologique (l’ingénierie) montre des instructeurs utilisant des projets missionnaires et de service ou des lectures obligatoires externes pour intégrer la foi dans leurs salles de classe. Cependant, je crois que le témoignage personnel de la connexion spirituelle sincère de l’enseignant avec son métier comble l’écart apparent entre les carrières technologiques et la foi à un niveau personnel pour les étudiants. Ce témoignage transmet que la connexion spirituelle n’est pas seulement ce que l’on fait mais aussi ce que l’on est. Pour ce faire, j’ai utilisé des narrations en trois catégories pour illustrer la corrélation que j’ai faite entre ma foi et ma carrière. La première est la narration de la sainte vocation biblique des technologues. La seconde narration montre comment la sainte Parole de Dieu nous a été transmise à travers les âges par des vecteurs de technologie humaine. Et la troisième est la narration des conceptions d'ingénierie créatives de Dieu que l’on observe dans la nature qu’il a déclarées être « très bonnes » (Genèse 1.31, NBS)2.

La narration de la sainte vocation biblique des technologues

Le saint appel à travailler dans la technologie débute avec le récit de la création dans la Bible où l’on voit Dieu créer l’humanité à son image. Cet appel se reflète aussi dans l’appel et la consécration que Dieu a donnés aux artisans (technologues) qui ont construit le tabernacle.

Le récit de la création déclare que Dieu a créé les humains à son image (Genèse 1.27, 27), et donc des êtres créatifs. La conception et la création de technologies sont un reflet de ce que Dieu a voulu que nous soyons – créatifs. Le travail technologique est un reflet de l’image de notre Créateur, un saint appel, et devrait être présenté comme tel dans l’éducation chrétienne.

Dans le récit de la création, il y a aussi le mandat de domination – l’instruction divine que les humains soumettent la terre et la dominent (Genèse 1. 28). La création d’équipements technologiques consume une grande quantité des ressources naturelles terrestres, et la vaste majorité des conceptions technologiques s’adresse aux 10 pour cent les plus riches de la population mondiale3. L’éthique de l’impact du développement technologique constitue un sujet passionnant pour des discussions en classe en rapport avec l’appel divin d’une responsabilité sociale et environnementale alors que l’on soumet la terre.

L’appel divin et la consécration des artisans du tabernacle (Exode 31.1-6 ; 35.20-36.1) mettent en évidence le fait que ces professions sont honorables spirituellement. C’est par son nom que Dieu a « appelé » Betsaléel au travail de la construction du bâtiment du tabernacle. Puis, il l’a comblé avec la capacité de faire toutes sortes de travaux réalisés par un artisan ou un concepteur (Exode 35.31-34). Il lui a « accordé le don d’enseigner » (Exode 35.34) – ce qui constitue un précédent biblique pour un appel spirituel aux carrières en technologie et aux éducateurs technologiques. Dieu a élargi sa consécration à tous les artisans du tabernacle, les remplissant « du souffle de Dieu, de sagesse, d’intelligence et de connaissance pour toutes sortes de travaux » (Exode 31.3). Le concepteur du tabernacle était Dieu, mais il a chargé des êtres humains d’utiliser leurs capacités données par Dieu, leur intelligence et leur connaissance pour développer la technologie, pour accomplir la tâche qui leur était confiée. De ce récit, je tire la conclusion que tous ceux qui travaillent dans la technologie, travaillent avec les dons de sagesse, d’intelligence et de connaissance que Dieu donne. Et nous sommes exhortés, tout comme les ingénieurs du tabernacle, à se mettre « au travail exactement comme le Seigneur l’avait ordonné » (Exode 36.1 ; Ecclésiaste 9.10 ; 1 Corinthiens 10.31 ; Colossiens 3. 23, 24), et à ordonner notre carrière comme un appel au service de Dieu. Ce compte rendu dans les Écritures peut abondamment alimenter des discussions en classe visant à combler le fossé de la foi.

Le récit de la Parole de Dieu confiée à la technologie humaine

La Bible est le fondement du christianisme, et Dieu a confié sa Parole sacrée à des techniciens humains et à la technologie humaine pour la préserver, la protéger, la reproduire et la répandre. Le récit biblique a commencé comme une tradition orale jusqu’à ce que la technologie soit capable de fournir des supports pour écrire, des encres appropriées et des méthodes d’application pour la transférer dans un document écrit4. La Parole de Dieu était si précieuse pour les premiers chrétiens qu’ils l’ont protégée de leur vie, et elle était si précieuse pour certains technologues chrétiens qu’ils ont développé des technologies pour la propager et la diffuser.

Selon la tradition juive, les premiers livres de la Bible ont été consignés sur peau d’animal (G’vil) et formés en parchemin5. Cette peau faite de cuir d'animal tanné, non fendu, était le fruit d’une technologie et une surface d’écriture utilisée en Égypte à cette époque. De la poudre de sulfate de fer incorporée dans l’encre réagissait avec l’acide tannique de la préparation de la peau pour donner une teinte noire pure qui adhérait bien.

D’autres manuscrits bibliques étaient écrits sur papyrus, une surface végétale, dont l’Égypte avait le monopole, le papyrus ne poussant que le long du delta du Nil. La couche externe de la tige du papyrus était enlevée, laissant une moelle interne fibreuse collante qui était tranchée longitudinalement en fines lamelles. Ces lamelles étaient posées en deux couches perpendiculaires sur une surface dure et martelées ensemble alors qu’elles étaient humides, puis séchées sous pression. Les feuilles séchées étaient polies et frottées avec de l’huile de bois de cèdre pour obtenir une surface d’écriture lisse capable d’accepter facilement l’encre. Les feuilles étaient coupées sur mesure et collées ensemble avec une pâte à base de farine dans le sens du grain afin de faire un rouleau. Les scribes écrivaient sur le côté qui présentait le motif du grain horizontal qui leur donnait un guide d'écriture naturel en ligne droite.

L’encre pour les papyrus était fabriquée à base de baies, de plantes et de minéraux, et était appliquée avec un pinceau en roseau fait de tiges tubulaires creuses d'herbes des marais. Une pointe émoussées était découpée à un bout et taillée de multiples fois pour façonner un pinceau fin pointu. Le roseau vide était rempli d’encre qui était dirigée vers la pointe en pressant le roseau.

Le papyrus a été utilisé de 2000 av. J.-C. jusqu’au XIIe siècle apr. J.-C. Bien que la durée de vie prévue du papyrus soit de 30 ans, on a trouvé d’anciens papyrus en Égypte et dans le désert de Judée qui ont été préservés grâce au climat sec et aride. Des fragments de papyrus de l’Ancien Testament, et datant du deuxième siècle av. J.-C., ont aussi été trouvés.

La progression suivante pour une surface d’écriture biblique a été le parchemin, plus durable que le papyrus. Le parchemin était fabriqué à partir de peaux animales en utilisant un processus plus raffiné que pour le G’vil. La production de parchemin nécessitait un procédé lent, physiquement exigeant, sensible au facteur temps et compliqué – ce qui rendait le produit coûteux. On croit que le procédé du parchemin a été raffiné à Pergame entre 250 et 150 av. J.-C. alors que l’Égypte a temporairement arrêté d’exporter des papyrus. Le parchemin a été utilisé jusqu’à l’ère de l’impression ; cependant ce n’est pas avant le IVe siècle apr. J.-C. que son utilisation est devenue plus courante que celle du papyrus.

Quand Constantin est devenu chrétien au IVe siècle apr. J.-C., le péril de la destruction des textes sacrés s’est estompé et la reproduction de la Bible a été approuvée par l’État. On a utilisé des parchemins coûteux, et une nouvelle encre à base de sels de fer, de tanins et de résine a été développée ainsi que la plume d’oie. À travers le Moyen Âge, ce sont les chrétiens qui ont développé la production de parchemins de qualité, de pigments et d’encres alors que des scribes recopiaient laborieusement les manuscrits bibliques à la main6. Les manuscrits enluminés de cette période présentaient dans les caractères écrits des ombrages et des décorations, des couleurs éclatantes, des ornements, de petites images, avec l’utilisation de la feuille d’or. La beauté de ces manuscrits médiévaux habilement ornés témoigne de la grande valeur attribuée à la Bible, et de la passion de donner à Dieu le meilleur de ce que l’art pouvait fournir à cette époque.

Les premiers chrétiens sont crédités pour avoir soutenu le développement technologique le plus important dans la diffusion de la connaissance avant l’impression – le passage du manuscrit sous forme de parchemin à une forme codex de reliure. Le codex est une collection de feuilles de matériel flexible – papyrus ou parchemin – pliées en deux et reliées par une couture. Le codex était généralement protégé par des couvertures en bois, et dans le cas d’un parchemin, un fermoir était utilisé pour serrer le codex entre les couvertures en bois afin que le parchemin ne se déforme pas en raison des changements d'humidité.

Le codex présentait beaucoup d’avantages sur le parchemin. Il était économique puisque les deux côtés de la surface d’écriture étaient utilisés, plutôt qu’un seul côté pour les parchemins. Il offrait une meilleure accessibilité – les textes étaient plus faciles à trouver et à comparer avec un manuscrit plus grand. Le codex était aussi plus compact – il pouvait être tenu dans une seule main et il était plus facile à transporter et à dissimuler.

Les chrétiens ont immédiatement adopté la forme du codex. Presque tous les manuscrits anciens qui ont survécu – le plus ancien datant du IIe siècle après J.-C. – sont sous forme de codex. Cependant, la prévalence suggère que le codex a probablement débuté plus tôt que cela. Par contre, pour les écrits séculiers, le changement a suivi une tendance très lente quoiqu’irréversible. Aux Ier et IIe siècles après J.-C., le parchemin était considéré comme la forme correcte de livres pour la bonne société. Au IIIe siècle, le codex a obtenu l’égalité juridique avec le parchemin dans les règlements successoraux7. Il a fallu cependant attendre jusqu’au Ve siècle pour que 90 pour cent des manuscrits non chrétiens soient sous forme de codex8.

Timothy Stanley 9 propose que la raison pour laquelle les chrétiens ont universellement adopté – à l’encontre de la culture – le codex était que cette technologie leur permettait de relier ensemble plus de textes que ne le permettait le parchemin, ce qui donnait à leurs écrits un effet unificateur. Les quatre récits parallèles des Évangiles pouvaient être reliés ensemble plutôt que séparés en quatre rouleaux de parchemins. Les lettres de Paul pouvaient être reliées dans un codex, et ces documents non narratifs étaient mieux consultés dans la forme d'accès aléatoire du codex. Le codex – une technologie promouvant l’unité théologique – permettait aux premiers chrétiens d’avoir une collection de littérature sacrée.

La préciosité de la Parole de Dieu a une fois de plus stimulé la technologie en 1450 quand Johannes Gutenberg a inventé une presse à caractères mobiles afin d’imprimer la Bible. Gutenberg a adapté la technologie du pressoir à vin combinée à ses propres inventions dans le domaine de la fonte de lettres métalliques de type mobile et d’une encre à base d’huile qui collait au métal. En 1620, la presse de Gutenberg était considérée comme ayant eu le plus grand effet de toutes les inventions, égalée seulement par la poudre à canon et la boussole. Seulement 50 ans après l’invention de la presse, le nombre de livres imprimés égalaient 1000 années de travail de scribes européens10.

Gutenberg a imprimé des Bibles entre 1450 et 1455 et en a produit environ 200 copies, certaines sur parchemin et d’autres sur papier, une surface d’écriture de pulpe végétale bien meilleur marché et facile à fabriquer. Puis, Gutenberg a fait faillite et ses créanciers, qui n’étaient pas intéressés à l’impression de Bibles, ont repris sa presse. Il ne reste jusqu’à ce jour que 21 copies complètes des Bibles de Gutenberg11. Elles sont considérées comme étant les livres les plus précieux au monde, chacune étant évaluée entre 25 et 35 millions de dollars12.

La technologie a continué à changer le visage de notre Bible. Nous avons maintenant la Bible sous forme audio, des Bibles sur Internet consultables dans de nombreuses versions et langues, des Bibles pour smartphone. On crée en ce moment une technologie biblique de pointe pour lire les anciens manuscrits – de puissants outils d’imagerie pour lire les manuscrits qui sont trop fragiles pour les dérouler et pour deconstituer une écriture trop pâle pour la voir13. La précieuse Parole de Dieu nous a été transmise à travers les âges par la technologie humaine et elle continue à participer à la préservation et à la diffusion bibliques.

Le récit des conceptions techniques de Dieu déclarées « très bonnes »

Dieu est le tout premier ingénieur, le Maître concepteur du monde et de tous ceux qui le peuplent. Malgré la chute et la souillure du péché et de la décomposition, la nature nous donne encore des révélations de conceptions optimisées, curieusement complexes, et soigneusement élaborées par Dieu. La nature fait des exploits dont les ingénieurs ne peuvent que rêver, qui attirent l’attention d’un large éventail de chercheurs et scientifiques qui ont produit une véritable avalanche d’études sur les processus incroyablement raffinés de la nature en vue du développement de meilleures technologies. Ce domaine de recherche et la technologie innovante qui en découle portent plusieurs noms : bioinspiration, bionique, biomimétisme, ou biomimétique. L’étude de la nature du point de vue technologique nous donne un aperçu des conceptions impressionnantes, exquises et élégantes de Dieu, le Maître ingénieur.

La recherche en biotechnologies couvre un si large éventail d’applications technologiques dans la nature, que nous ne pouvons en présenter ici qu’un petit échantillon – des bribes extraites de plusieurs catégories. Une simple recherche sur Internet fournira une variété de détails extraordinaires sur les exemples listés et une mine d’or sur d’autres conceptions bioinspirées. Pour les chrétiens, ces exemples sont des fenêtres sur les conceptions divines ingénieuses, complexes et mûrement réfléchies dans les plus infimes détails.

Matériaux naturels : Les matériaux naturels sont tellement supérieurs aux matériaux anthropiques que les chercheurs ont passé beaucoup de temps à essayer de les synthétiser. Les scientifiques ont cherché à reproduire la soie d’araignée et la nacre de coquillage d’ormeau à cause de leurs incroyables propriétés structurelles, mais jusqu’à présent ils ne sont pas arrivés à contrôler les propriétés matérielles à petite échelle de la coquille d’ormeau ni à maîtriser le colossal séquençage génétique de la soie d’araignée14. Le besoin médical d’adhésifs en milieu humide s’est tourné vers la nature pour s’en inspirer. Les humains ont créé quelques adhésifs impressionnants mais aucun ne fonctionne en milieu humide. La recherche dans ce domaine a débuté avec les moules qui collent leurs coquilles sur des surfaces sous-marines, et s’est étendue aux larves de trichoptères et aux vers marins de château de sable qui construisent des tubes protecteurs avec des petits morceaux de matériaux disponibles15.

Mobilité animale : Malgré tous les progrès que les ingénieurs ont faits en robotique, la mobilité demeure un problème dans les endroits où les roues ne fonctionnent pas bien, où le terrain est accidenté et où il y a des obstacles. Une fois de plus, les chercheurs et les ingénieurs se tournent vers la nature pour résoudre quelques-unes de ces difficultés. Boston Dynamics est le chef de file dans le développement de systèmes de rétroaction complexes afin de conserver l’équilibre robotique pour la mobilité de la marche. Cette compagnie a développé un robot mulet qui peut traverser un terrain accidenté, un humanoïde qui agite ses appendices dans tous les sens pour maintenir l'équilibre lorsqu'il est bousculé, et un robot guépard à quatre pattes avec une colonne vertébrale flexible qui permet de galoper à grande vitesse. Festo, une entreprise manufacturière allemande avec une division consacrée aux conceptions bioinspirées, est un des chefs de file dans le domaine du vol robotique. Cela fait des années que cette entreprise déchiffre le vol des oiseaux dans le but de créer son SmartBird (oiseau intelligent) qui vole avec des ailes plutôt qu’avec des hélices. Malgré des années d’investissement dans la mobilité et l’équilibre, tous ces robots sont limités par la vie de leur batterie ou attachés par des cordons d’alimentation, et le fonctionnement du robot mulet était trop bruyant pour les mouvements militaires clandestins pour lesquels il avait été conçu dans le but de les faciliter.

Formes aérodynamiques : Les formes aérodynamiques dans la nature se sont révélées bien supérieures à la compréhension humaine de la dynamique des fluides. Cependant, quelques innovations à partir d’éléments naturels ont été empruntées par l’homme. Les couches flexibles des petites aspérités sur la peau de requin ont été imitées pour donner de meilleures propriétés aérodynamiques aux avions à réaction, aux bateaux et aux maillots de bain16. Ces produits ont connu un tel succès que les revêtements de bateaux ont été bannis de la voile de compétition en 1987, et les maillots de bain Speedo en peau de requin ont été refusés après les Jeux Olympiques de 2008. Plus récemment, les scientifiques ont examiné de plus près les bosses bizarres sur le bord d'attaque des nageoires des baleines à bosse17. Comparées aux nageoires lisses, les nageoires des baleines à bosses ont 30 pour cent de moins de résistance et 8 pour cent de plus de portance, ce qui les rend extrêmement adroites et aquatiques pour leur taille. La puissance baleinière développe des pales d’avant-garde bosselées pour turbines, pompes et ventilateurs qui sont 20 pour cent plus efficaces que les pales classiques.

Formes pour fonctions : Copier des formes que l’on trouve dans la nature pour accomplir une tâche ou une fonction est l’une des plus anciennes forme de biomimétisme. C’est en 1955 que le velcro a été développé, inspiré par les petits crochets vus au microscope sur les bardanes à graines épineuses, et qui collent aux vêtements et aux animaux18. Le système de ventilation d’un complexe de bureaux et de commerces – le Eastgate Center – au Zimbabwe, a été façonné d'après les monticules de termites qui se refroidissent d'eux-mêmes. Son système de refroidissement passif utilise 90 pour cent moins d’énergie que les systèmes de climatisation des bâtiments voisins de taille similaire19. Inspirée par le scarabée du désert Namib qui récolte l’eau de la rosée matinale en utilisant la structure de la surface de son dos20, la Dew Bank a conçu un prototype qui a synthétisé ces caractéristiques de surface pour produire un verre d’eau à partir de l’air du désert.

Fabrication : La fabrication moderne implique généralement des pressions et des températures élevées à forte consommation d'énergie, des tas de déchets et beaucoup de produits secondaires toxiques. Dieu a conçu la nature de façon à ce qu’elle crée tous ses produits à une température, une pression, un pH normaux, à partir de matériaux biodégradables et à base d’eau. Ces produits n’utilisent pas de combustibles fossiles et ne polluent pas la planète. Il y a une volonté de trouver des techniques de fabrication qui soient respectueuses de l’environnement, similaires aux procédés d’assemblage de la nature. Angela Belcher au MIT a utilisé des virus pour créer une batterie21. Elle a manipulé l’ADN des virus de sorte que les inorganiques et les nanotubes se lient à sa couche extérieure, créant les électrodes positives et négatives. Ce n’est que le début d’un long cheminement pour essayer de fabriquer avec le même environnementalisme dont Dieu a voulu témoigner à travers la nature.

Pensées finales

Notre foi chrétienne est fortement liée à la technologie. Dieu a ordonné les carrières techniques quand il nous a conçus pour être créatifs, et quand il a appelé Betsaléel et consacré les artisans du tabernacle. Dieu a confié à des technologues et à la technologie humaine la création d’un lieu où il pourrait demeurer parmi nous, et il a confié à des technologues et à la technologie humaine la préservation et la diffusion de sa Parole qui est le fondement de notre foi. Dieu nous a aussi donné l’inspiration pour le développement technique au sein de son monde qu’il a soigneusement et délicieusement créé.

Soyons assidus dans nos carrières données par Dieu, et suivons ses traces créatives. Demandons la même consécration que les artisans du temple. Approprions-nous du nom Betsaléel quand nous abordons notre métier, que l’on soit un concepteur ou un enseignant. Chérissons la technologie qui nous a procuré notre Bible. Émerveillons-nous de la pensée et de l’attention que Dieu a apportées à la conception de notre monde. Et quand cela fera partie de l’histoire de notre vie, introduisons intentionnellement les récits sincères de cette connexion à notre foi dans nos cours basés sur la technologie.


Cet article a été revu par des pairs.

Laurel Dovich

Laurel Dovich, Ph.D., PE, est ingénieure en structure. Au moment de la rédaction de cet article, elle était professeure de génie à l'université Walla Walla à College Place, Washington, États-Unis.

Référence recommandée :

Laurel Dovich, Les carrières en technologie et la foi : combler le grand fossé, Revue d’éducation adventiste. Disponible à https://www.journalofadventisteducation.org/fr/2019.81.2.3.

 

NOTES ET RÉFÉRENCES

  1. Les carrières en technologie comportent des défis éthiques liés à la guerre, à la justice sociale et environnementale et à la sécurité des produits, mais on en parle rarement.
  2. Tous les textes bibliques de cet article sont tirés de la Nouvelle Bible Segond, NBS, 2002.
  3. Cynthia E. Smith, National Design Museum, Smithsonian Institution, Design for the Other 90 Percent (New York : Assouline Publishing, 2007), 19, 133.
  4. Il existe de nombreux livres sur la fabrication de la Bible qui incluent la technologie utilisée.
  5. Moïse Maïmonide, Mishneh Torah : Sefer Ahavah, Eliyahu Touger, trad. (Israël : Moznaim Publishing Corp., 2010), Tefillin 1:8 et commentaire : http://www.chabad.org/library/article_cdo/aid/925417/jewish/Chapter-One.htm.
  6. Colin Henderson Roberts et Theodore Cressy Skeat, The Birth of the Codex (Londres : The British Academy par The Oxford University Press, 1987), 32.
  7. Ibid.
  8. Ibid. 37.
  9. Timothy Stanley, "Faithful Codex : A Theological Account of Early Christian Books ", The Heythrop Journal 57:1 (2016), 17, 18.
  10. Nicholas Carr, The Shallows : What the Internet Is Doing to Our Brains (New York : W. W. W. Norton, 2010), 69.
  11. "Gutenberg Bible", Wikipedia : http://en.wikipedia.org/wiki/Gutenberg_Bible.
  12. Philipp Harper, "In the Book World, the Rarest of the Rare", NBC Today (13 décembre 2004) : http://www.today.com/id/6124643.
  13. Robert Draper, "The Bible Hunters", National Geographic 234:6 (2018) : 61.
  14. Peter Forbes, The Gecko's Foot : Bio-Inspiration-Engineering New Materials From Nature (New York : W. W. W. Norton, 2006), 55-78 ; 139-142.
  15. Henry Fountain, "Studying Sea Life for a Glue That Mends People", New York Times (12 avril 2010) : https://www.nytimes.com/2010/04/13/science/13adhesive.html.
  16. Jay Harman, The Shark’s Paintbrush : Biomimicry and How Nature Is Inspiring Innovation (Ashland, Ore : White Cloud Press, 2013), 86-94.
  17. Harman, The Shark's Paintbrush, 97-102.
  18. Forbes, The Gecko's Foot, 92-95.
  19. Harman, The Shark’s Paintbrush, 150.
  20. Forbes, The Gecko's Foot, 50.
  21. Anne Trafton, "New Virus-Built Battery Could Power Cars, Electronic Devices", MIT News (2 avril 2009) : http://news.mit.edu/2009/virus-battery-0402.