Editorial | Faith-Ann A. McGarrell

L’autre sandale

L’histoire raconte qu’un jour Mahatma Gandhi était pressé d’attraper le train. Alors que le train ralentissait, et qu’il sautait sur la plateforme, il a perdu une de ses sandales qui est tombée sur le sol entre les rails. Sans hésitation, Gandhi a enlevé son autre sandale pour la jeter dans la direction de celle qui était tombée. Questionné sur cette action apparemment bizarre, il a expliqué qu’il était préférable que quelqu’un trouve deux sandales plutôt qu’une. Ce simple acte de gentillesse, cette « sandale jetée » résume la puissance des petites actions qui produisent d’importants changements1.

On reconnaît l’influence de Gandhi sur les dirigeants du monde entier, mais il a également été soucieux de ceux qui se trouvaient dans son entourage immédiat. Chacun de nous a une possibilité similaire. Comme le dit un auteur : « Notre réel pouvoir n’est pas nécessairement de changer le monde entier mais de changer le monde des personnes que nous rencontrons chaque jour grâce à un sourire, un mot gentil, en cherchant à trouver un moyen de jeter une sandale sur les rails – voilà le pouvoir que nous avons aujourd’hui et chaque jour »2. Ces petits gestes de gentillesse, aussi petits soient-ils, ces sandales jetées, ont le pouvoir de faire naître l’espoir, d’inspirer le changement.

Un autre auteur, cependant, ayant réfléchi à ce fait anecdotique de la vie de Gandhi, a avancé que jeter cette sandale a été plus qu’un acte charitable de plus, cela a été un acte qui a révélé une prise de conscience de deux réalités marquantes : « Il savait ce dont avaient besoin les gens dans le monde, et il savait ce qu’il fallait lâcher »3. En d’autres mots, il avait intégré l’interaction dynamique entre le besoin, l’opportunité et le principe dans sa vie et son travail.

Pour nous éducateurs, notre influence s’étend au-delà des murs de nos salles de classe. Elle se répercute à l’échelle mondiale grâce à la formation du caractère et à l'acquisition de connaissances par nos étudiants. Un sourire chaleureux, un gentil mot, et un environnement de classe accueillant et invitant, tout cela concourt à énergiser, inspirer et motiver les étudiants. Cependant, pour véritablement comprendre nos étudiants, nous devons les aimer comme Jésus nous aime. Il ne s’agit pas d’un amour superficiel mais d’un amour authentique qui perçoit leurs besoins, leurs expériences et les dures réalités de la vie sur cette planète. On parle d’un amour qui reconnaît, et se soucie, de l’apogée de la création divine – l’être humain. Nous ne pouvons pas fabriquer cet amour au moyen de notre volonté forte ou de notre détermination. Il croît grâce à une communication constante avec Dieu par la prière, l’étude des Écritures, et du temps de qualité avec le Créateur. Chacun de nous doit être assuré et confiant dans la conviction que nous sommes, nous aussi, aimés de Dieu (Jean 3.16 ; Romains 5.8) et que nous pouvons être transformés par cet amour (Jean 3.17: 8.12 ; 10.10,11). Comprendre les besoins de nos étudiants nous permet de favoriser un environnement d’apprentissage plus empathique et convivial.

Il en résulte que notre rôle n’est pas seulement de faire du bien dans le monde – d’améliorer la vie de nos étudiants – mais de comprendre que la véritable éducation est une œuvre divine. Dans True Education, nous lisons :
« Pour comprendre ce qu’implique le travail d’éducation, nous devons considérer à la fois la nature des humains et le but de Dieu en les créant. Nous devons aussi tenir compte du changement dans leur condition à cause de la connaissance du mal, et le plan de Dieu d’accomplir son glorieux objectif dans l’éducation de la race humaine4. »

À la base, le programme d'études est une question de décisions – quoi conserver et quoi éliminer. Les éducateurs se débattent avec la prise de décision en matière de programmes d'études chaque trimestre, pour chaque cours, chaque unité, chaque plan de leçon et chaque devoir. Les éducateurs cherchent à aligner et à intégrer les éléments fondamentaux de notre foi et de notre système de croyances alors qu’ils prennent des décisions sur le contenu et les approches pédagogiques. Quelle mission ! Mais nous ne faisons pas cela seuls. Dieu donne une abondante sagesse, généreusement et richement accordée à ceux qui le cherchent (Proverbes 2.6 ; Jacques 1.5-7). Cela inclut de travailler avec nos pairs, de chercher une formation de plus, de poursuivre un développement professionnel, de profiter des occasions de participer à une recherche, et de communiquer ces expériences pour améliorer notre pratique.

Dans ce numéro, nous partageons une collection variée d’articles. Dans « La création de Forestia », Karen Williams nous fait voyager avec ses jeunes élèves qui apprennent des leçons de vie dans la forêt. Caddabra Brown explore l’impact du traumatisme et offre des conseils pour renforcer les capacités de lecture et d'écriture en cas d'expériences de vie difficiles dans « Ma vie réelle vous importe-t-elle ? Créer une classe sensible aux traumatismes ». Margaret Adeogun présente Open Education Resources (OERs) – Ressources éducatives libres – et partage comment les bibliothèques universitaires peuvent s’associer aux facultés pour adopter, créer et adapter des ressources dans

« Redynamiser l’adoption de ressources éducatives libres dans l’éducation supérieure ». Avec des réflexions sur la pandémie de Covid-19, Santor Kumar révèle les leçons apprises dans « La crise pandémique parmi les éducateurs adventistes dans le contexte de l’Asie du Sud », et Eduardo Rueda Neto et André Vasconcelos offrent des perspectives bibliques dans « Une éducation environnementale à la lumière de la Bible ». Une courte méditation par Paulette Johnson intitulée « Leçons de désherbage » nous invite à revoir les domaines de notre vie qui nécessitent une remise en ordre. Finalement, nous partageons une courte histoire de cette publication – son passé, son présent et son avenir – dans « The Journal of Adventist Education® : Une histoire » par la rédactrice émérite Beverly J. Robinson-Rumble et l’actuelle éditrice du JAE.

Nous espérons que ces articles vous encourageront. Au-delà de cela, nous espérons que ce numéro vous donnera à réfléchir alors que vous prenez vos décisions en matière de programmes et d'enseignement. Nous acceptons les soumissions d’articles et avons diverses rubriques auxquelles vous pouvez contribuer : dossiers, perspectives, meilleures pratiques au travail, critiques de livres, ressources mises en évidence. Prenez le temps de lire nos lignes directrices pour les auteurs à https://www.journalofadventisteducation.org/author-and-reviewer-guidelines. Nous espérons avoir de vos nouvelles bientôt.

Faith-Ann A. McGarrell

Faith-Ann A. McGarrelle, Ph.D., est l’éditrice du Journal of Adventist Education. On peut la joindre à [email protected].

Référence recommandée :

Faith-Ann A. McGarrell, L’autre sandale, Revue de l’éducation adventiste, n°69.

NOTES ET RÉFÉRENCES

  1. Cet anecdote est très souvent cité mais on ne connaît pas son auteur. Voir Prakash Iyer, “Gandhi and the One Shoe Syndrome,” Medium (2016): https://medium.com/@prakashiyer/gandhi-and-the-one-shoe-syndrome-3567a4962cb6; “Gandhi’s Shoes” A Gift of Inspiration (n.d.): https://www.agiftofinspiration.com.au/stories/personalgrowth/ghandi.shtml;
  2. Tom Rapsas, “The Day Mahatma Gandhi Threw His Sandal Off a Train,” Patheos (24 juin 2017): https://www.patheos.com/blogs/wakeupcall/2017/06/mahatma-gandhi-threw-his-sandal/.
  3. Lory Hough, “What’s Worth Learning in School?” Ed. Magazine (10 janvier 2015): https://www.gse.harvard.edu/ideas/ed-magazine/15/01/whats-worth-learning-school.
  4. Ellen G. White, True Education (Nampa, Idaho: Pacific Press, 2000), 10.