Charity Garcia • Ingrid Weiss Slikkers • Tara Bailey

Changeons d’optique :

approches pratiques tenant compte des traumatismes pour les éducateurs

Apprentissage socio-affectif. Diversité et inclusion. Enseignement tenant compte des traumatismes. Voilà les mots à la mode en éducation qui suscitent aujourd’hui un intérêt croissant chez les éducateurs cherchant à soutenir les étudiants et les familles au milieu des réalités des ramifications continues de la Covid-191. Les enseignants et les administrateurs des petites écoles et des classes multiniveaux ont besoin de solutions pratiques qui s’alignent sur la vision du monde adventiste du septième jour et sa philosophie pédagogique.

Nous, les auteurs, partageons le privilège de travailler avec des jeunes et des enseignants dans le monde entier. Pourtant, nous avons remarqué que dans la réalité de notre monde brisé, nos étudiants (et, si nous sommes honnêtes, même nous), nous avons de la difficulté à nous concentrer sur des matières académiques et à suivre nos tâches jusqu’au bout. Les réalités individuelles des diverses formes de dysfonctions familiales, des abus, de la négligence2, de la violence dans la communauté, des conflits politiques, des tensions raciales, des désastres naturels et d’une exposition continuelle à ce qui peut être minimisé comme étant des « traumatismes moindres » surviennent à un rythme alarmant3. En outre, différents groupes de personnes ont fait l’expérience d’un traumatisme historique partagé ou de traumatismes collectifs. Certaines catégories d'écoliers (race, sexe, besoins spéciaux, apprenants neurodivergents, etc.) ont également des expériences diverses, partagées et parfois uniques. Toutes ces expériences affectent le cerveau, la biologie, le corps, les croyances et les comportements des individus4.

Peut-être que nous sommes comme les Israélites d’Exode 6 qui étaient tellement en détresse par le fardeau d’avoir à faire plus de briques avec moins de paille que lorsque Dieu a envoyé son message rédempteur par Moïse, qu’ils ne pouvaient pas l’entendre (v. 9). Les diverses traductions bibliques utilisent une autre terminologie, mais elles montrent systématiquement une image de personnes tellement dévastées, avec un esprit tellement brisé, qu’elles ne peuvent pas entendre le message de délivrance.

Lorsque je (I.W.S.) travaillais comme thérapeute auprès des enfants et des familles avant de devenir éducatrice universitaire, on me référait des jeunes avec des histoires personnelles dévastatrices. L’impact des facteurs de stress sur leur système nerveux les amenait non seulement à avoir des difficultés d’apprentissage mais aussi des difficultés à gérer leurs émotions ce qui, sur le long terme, conduisait à un potentiel important de nombreuses conditions nuisibles. Le cerveau est négativement affecté lorsque les niveaux de cortisol s’élèvent. Bien que la production de cortisol soit nécessaire pour un bon fonctionnement du corps et utile pour aider le corps à répondre au stress, ces dernières années, nous avons vu des niveaux de cortisol qui sont toxiques5 et qui peuvent produire une panoplie de symptômes tels que l’anxiété, la dépression, des problèmes digestifs, des maux de tête, de la tension et de la douleur musculaires, des maladies cardiaques, de l’hypertension, un AVC, des problèmes de sommeil et des troubles de la mémoire et de la concentration6.

Enseignante dans une école d’une seule pièce, je (T.B.) je ressens cela ! Les salles de classe multiniveaux remplies de visages tristes, de pensées négatives, d’insécurités, d’agressions, de comportements rébarbatifs ne peignent qu’une petite image de ce que je vis année après année. Même après avoir servi comme administratrice et enseignante pour plus de 20 ans, je ne m’habitue jamais à faire face au défi de recevoir de nouveaux étudiants dans ma classe, sachant qu’ils arriveront avec un large éventail d’états d’esprit, d’expériences et d’antécédents. En tant qu’éducatrice adventiste, je sais que je joue un rôle vital dans la façon dont la diversité est abordée dans ma petite classe.

Pour ma part, moi (C.G.), j’ai eu l’unique opportunité de m’attaquer aux réalités que ma co-auteure (T.B.) a partagé en tant qu’enseignante dans une école intermédiaire et secondaire. J’ai aussi eu la responsabilité de préparer des enseignants en formation initiale et en service à répondre au besoin généralisé d’approches tenant compte des traumatismes chez les étudiants. L’espoir est possible, particulièrement quand les enseignants reçoivent de l’aide en se dotant d'outils et de stratégies de mise en œuvre. C’est avec cette compréhension que les éducateurs adventistes du septième jour peuvent aborder les divers besoins de divers groupes tout en laissant de la place aux différences et expériences individuelles. C’est le cœur du travail de diversité et d'inclusion basé sur les traumatismes.

L’ampleur du problème

Selon Dan Spiegel, « traumatisme est le mot utilisé pour signifier une ou des expériences bouleversantes » ou « une ou des expériences qui ont dépassé notre capacité à faire face »7. Les cerveaux humains, à cause de l’état actuel de notre monde, réagissent au stress chronique qui atteint des niveaux historiques. Les niveaux élevés de cortisol ne permettent pas au corps humain de passer d'une condition de réponse de crise à une réponse de repos et de récupération/restauration qui est si essentielle pour l’apprentissage et les relations sociales.

Le réseau national sur le stress traumatique de l'enfant (É.-U.) déclare que les enfants qui ont subi un traumatisme peuvent manifester diverses réactions dont un bouleversement émotionnel permanent et intense, des symptômes dépressifs ou de l’anxiété, des changements comportementaux, des difficultés d’autorégulation, des problèmes de relation avec les autres ou à s’attacher aux autres, une régression ou une perte de compétences acquises antérieurement, des difficultés d’attention et académiques, des cauchemars, des difficultés à dormir ou à manger, des symptômes physiques tels que des courbatures et des douleurs.

Les adolescents peuvent faire usage de drogues, d’alcool, avoir des comportements à risque ou adopter une activité sexuelle malsaine8. « La croissance à un niveau plus élevé est retardée, laissant certains enfants à la moitié de leur âge en termes de fonctions cognitives. Les fonctions cérébrales de niveau inférieur, qui contrôlent les réactions instinctives de fuite ou de combat, se développent excessivement en réponse au traumatisme »9.

Le chapitre du livre sur les réponses réparatrices basées sur les traumatismes de Revealing Jesus in the Learning Environment, indique :

« La majorité des traumatismes surviennent dans le contexte de relations. Abus, négligence, violence, ils sont tous infligés par une tierce personne, et souvent quelqu’un de proche. Malheureusement dans ce monde brisé, les relations provoquent souvent encore davantage de souffrance. Les élèves que vous avez dans votre classe peuvent avoir d’eux-mêmes, des autres, et même de Dieu, à cause de la façon dont ils ont été traités, des perceptions faussées. Ils peuvent souffrir des conséquences prolongées d’un traumatisme au sein d’une relation qui aurait dû les construire plutôt que les détruire »10.

Il n’est pas rare que le traumatisme se révèle dans les fondements de l'apprentissage et le processus d'apprentissage lui-même. Les élèves qui ont des traumatismes non résolus peuvent avoir des difficultés à traiter des communications orales et écrites. Ces élèves bénéficieront d'un enseignement dispensé selon des modalités multiples. Le fonctionnement exécutif (les processus mentaux et le fonctionnement cognitif qui aide quelqu’un à réguler son comportement, se rappeler, planifier, se concentrer et penser) pour beaucoup d’élèves, souvent est aussi une lutte. En vue de leur succès, une instruction explicite, la représentation visuelle, la pratique guidée des procédures et la réalisation des objectifs étape par étape sont essentielles. Pour de tels élèves, il peut aussi être très difficile de saisir les relations de cause à effet11.

Comprendre ces questions peut également permettre de comprendre pourquoi des élèves ne réagissent pas bien à des stratégies de gestion de classe qui s’appuient lourdement sur une approche axée sur les conséquences sans le soutien supplémentaire de la rééducation du cerveau pour qu’il réponde différemment dans l’avenir. Les élèves peuvent avoir de la difficulté avec les transitions dans ou entre les sujets ou être incapables de rester concentrés sur leurs travaux académiques. Ce manque de concentration n’est pas le résultat de l’inattention de l’élève mais plutôt d’une concentration hypervigilante sur ce qui peut nous paraître être complètement la mauvaise chose. Nos élèves peuvent fixer leur attention sur leur environnement et les plus petites modifications dans le ton, la cadence, le langage corporel ou une variété d'apports sensoriels autour d'eux dans le but d’assurer leur sécurité personnelle. (Pour d’autres stratégies, nous recommandons de consulter : l’intervention relationnelle basée sur la confiance à l'Institut de développement de l'enfant Karyn Purvis (http://tcu.edu) , le travail de Lori Desautel sur Connection Over Compliance (http:revelationsineducation.com) et le travail de Ross Greene sur Collaborative Problem Solving (http://www.cpsconnection.com.)

Changer de perspective

Face à l’impact stupéfiant du traumatisme, on attribue à Sandra Bloom12le mérite d'avoir changé la perspective de demander « qu’est-ce qui ne va pas chez vous ? » en demandant « qu’est-ce qui vous est arrivé ? » Ce changement va révolutionner la façon dont nous travaillons avec les personnes qui souffrent émotionnellement. L’approche tenant compte des traumatismes met en œuvre les trois piliers de Howard Bath13 pour réaliser un environnement propice à la guérison et à la croissance : sécurité, connexions et gestion des émotions.

Quand nous réfléchissons à nos classes dans nos petites écoles, et particulièrement nos classes dans une seule pièce, il peut être écrasant, même pour un enseignant expérimenté, de combler les besoins des élèves qui ont à relever les défis susmentionnés. Pour que leur corps et leur cerveau se développent et guérissent, ces enfants doivent se sentir en sécurité. De profondes connexions et relations, particulièrement avec des adultes, sont essentielles à la croissance. Ainsi, tout au long de la vie14, la reconnaissance et la gestion des émotions sont indispensables au bien-être. Pour soutenir les élèves culturellement et socio-émotionnellement, tout en étant sensibles à leurs traumatismes, avant tout, avant le programme d’études et son contenu, attentions et préoccupations doivent venir en premier. C’est à l’intérieur de ce développement de la personne globale que les étudiants sont préparés « pour la joie du service dans ce monde, et pour la joie plus grande encore du vaste service dans le monde à venir »15.

La mise en œuvre des principes

Alors que nous cherchons à introduire ces piliers dans une structure déjà exigeante, nous devons nous appuyer sur la sagesse, le succès et la force de Christ (voir Philippiens 4.13 et Education p. 21). D'innombrables stratégies peuvent être envisagées pour chaque classe. Par contre, les enseignants doivent continuer à garder à l’esprit les trois piliers quand ils décident si les stratégies choisies seront efficaces pour leurs élèves. Les auteurs de cet article et d’autres enseignants ont utilisé les stratégies suivantes pour répondre efficacement aux besoins de ces étudiants :

Sécurité

Il est essentiel de s’assurer que les élèves sont physiquement en sécurité (en utilisant divers exercices, les protocoles COVID, etc.), mais développer un environnement où tous les étudiants se sentent en sécurité est également important. Veillez à établir intentionnellement des relations et un rapport avec chaque élève. Autant que possible, apprenez comment chaque élève pense, et ce qui permet à chacun de se sentir en sécurité.

Créer des horaires et des routines prévisibles (et des plans d'urgence pour les situations où la flexibilité est nécessaire)

Les écoles sont généralement très bonnes pour développer une structure grâce à des structures et des routines. Il faut construire là-dessus en créant une stratégie à utiliser quand les choses ont besoin de changer. Par exemple, en présentant l’horaire pour l’année scolaire, il faut veiller à l’afficher en classe et parler des périodes où il faudra de la flexibilité. Des cartes en couleur laminées spécifiques peuvent représenter ces périodes particulières. Il est bon de mettre une carte à côté de la place sur l’horaire quotidien qui nécessitera de la flexibilité. Par exemple, une « carte de flexibilité » bleue pourrait être mise à côté de la partie de l’horaire pour « dehors à l’heure du déjeuner » pour signaler que la récréation du midi se fera dans le gymnase à causes des conditions météorologiques. L’enseignant qui rassure les élèves qu’il a un plan pour les actions physiques inattendues et spécifiques à poser quand l’inattendu survient, leur donnera confiance que leur sécurité sera maintenue.

S’attendre à des réponses inattendues

Quand les étudiants ont connu des expériences de vie traumatisantes, cela peut déclencher des comportements que les enseignants pourraient autrement qualifier de « difficiles ». Les éducateurs doivent être prêts à faire face à n’importe quelle réponse inattendue dans leurs interactions avec leurs élèves. Se préparer à de telles réponses peut aider les enseignants à tourner une situation potentiellement désastreuse en une expérience d’apprentissage. Par exemple, un enseignant peut décider de poser la question « quel est le besoin derrière le comportement de cet élève » ? Avec un tel état d’esprit, les enseignants peuvent identifier les cinq à sept comportements difficiles les plus courants (soit, abandon/ manque d’attention, réponses insolentes, refus qui rapidement passent à la colère ou les pleurs, élèves qui sortent de la classe en courant) qui surviennent dans leur classe et identifier plus proactivement une série de phrases et actions pour faire face à ces situations. De plus, alors que les enseignants apprennent à connaître leurs étudiants individuellement ainsi que leurs réactions probables, ils peuvent travailler avec l’enfant et sa famille pour identifier des réponses spécifiques qui soutiendront l’élève afin qu’il puisse se remettre au travail.

Connexions

Les relations entre l’enseignant et ses élèves peuvent affecter significativement leur résilience16 et leurs études. Selon Perry et Szalavitz, « ce sont les gens, et non les programmes, qui changent les gens »18. Une façon de réaliser cela est de mener des contrôles quotidiens avec les élèves. Par exemple, on peut demander aux élèves d’utiliser la métaphore d’un moteur, vérifier comment ils vont et choisir la couleur appropriée – bleu pour « trop lentement », vert pour « correct » rouge pour « trop vite » (voir The Alert Program : https://www.alertprogram.com/teachers/). Ou encore, les élèves peuvent indiquer comment ils se sentent en levant le pouce, en le baissant, en le plaçant sur le côté ou en indiquant sur un tableau ce qui décrit le mieux leur état d'esprit.

Quand une classe est composée de plusieurs niveaux, de différents âges et niveaux de capacité, des sondages peuvent identifier les zones problématiques dans la vie des élèves et ce qui les rend mal à l’aise. À la suite de cela, l’enseignant ou le conseiller peut s’entretenir individuellement avec eux afin d’être sûr que les résultats du sondage sont exacts, et prendre alors l’action appropriée pour résoudre les problèmes identifiés.

Mettre en œuvre des interactions significatives

Les classes de petite école peuvent rapidement devenir houleuses alors que l’enseignant essaie de remplir avec succès les nombreux besoins pédagogiques de chaque journée. Allant d’un groupe à l’autre, il y a toujours le risque de perdre une connexion personnelle avec ce qui se passe avec chaque élève. Voilà trois stratégies pour aider les éducateurs dans les petites écoles à établir des interactions significatives avec leurs étudiants :

Stratégie no 1 : S’attacher à changer la façon dont vous donnez des instructions ou répondez. Vous pouvez diminuer les risques de comportements problématiques avec votre patience et votre ton de voix. Les enseignants font 50 % de chaque interaction avec un élève. Par exemple, votre classe travaille sur un projet de groupe et quelques élèves ne veulent pas participer. En choisissant d’être patient et en prenant le temps de demander pourquoi, vous pourriez être surpris de découvrir qu’ils vous montrent des façons de rendre le projet plus intéressant.

Stratégie no 2 : Éviter les directives autoritaires. Même si nous sommes, nous les enseignants, l’autorité dans nos classes, nous n’avons pas besoin d’essayer de le prouver constamment. Nous sommes là pour servir et enseigner, et nous devons donc valoriser les sentiments de chaque élève. Les enfants sentent quand quelqu’un se soucie seulement d’être au contrôle et non pas comment ils se sentent. Il faut donc éviter les luttes de pouvoir chaque fois que possible. Nous devons faire une pause et considérer de quelle façon nous disons les choses et comment nos réponses affectent les autres. Par exemple, écrire des directions soigneusement libellées sur une note autocollante et la placer gentiment sur le pupitre de l’élève afin d’éviter une scène, tout en passant quand même les instructions. Prévoir un temps d'attente généreux pour le suivi des instructions.

Stratégie no 3 : Accorder à chaque élève un sentiment de contrôle dans la prise de décision. C’est à ce moment que vous pouvez utiliser votre autorité pour guider les élèves vers une bonne prise de décision. Le partage de pouvoir dans la prise de décision avec nos élèves leur permet d'assumer leurs choix et leurs engagements. Intégrez le choix dans vos directives. Par exemple, au lieu de dire « Mettez-vous en rang avec les autres élèves », vous pouvez leur offrir un choix en demandant « Voudriez-vous aller à votre position assignée dans la ligne ou à l'arrière ? ». Les options de choix devraient être soigneusement libellés afin que les élèves apprennent l’avantage de prendre de bonnes décisions.

Établir une relation

Quand les écoles ont des structures de classe intimes et une petite population d’élèves, établir une relation avec ces derniers et apprendre à connaître chacun d’eux en tant qu’individu bâtira la confiance. Voilà des stratégies qui ont bien marché pour nous :

Stratégie no 1 : Une stratégie très simple est de saluer chaque jour les étudiants par leur nom, mais on oublie cela facilement. Chaque élève, et particulièrement nos élèves traumatisés, devraient être appelés par leur nom chaque jour à l’école. Cela devrait se faire en premier lieu le matin. Vous pouvez avoir un moment de rencontre pour permettre aux étudiants de se saleur les uns les autres. Cela vous donnera l’occasion de saluer les élèves avec lesquels vous cherchez particulièrement à construire une relation plus solide. Enseignez à votre classe à se saluer avec amour, attention et respect.

Stratégie no. 2 : La règle 2 par 10 de McKibben19 est une stratégie qui peut être utilisée spécifiquement pour les étudiants qui ont besoin de développer, aussitôt que possible, une relation de confiance avec leur enseignant afin qu’ils puissent se mettre à apprendre efficacement. Pour apprendre à les connaître, parlez-leur 2 minutes par jour pendant 10 jours sur des sujets sans relation avec les études ou le comportement. Ou encore, s’il y a beaucoup d’élèves à qui cette stratégie pourrait faire du bien, et que l’enseignant manque de temps pour la mette en œuvre avec chacun d’eux individuellement, un temps de journalisme ciblé de deux minutes en groupe pourrait être utilisé. Pendant 10 jours, les étudiants prennent deux minutes chaque jour, pour rédiger dans leur journal comment ils se sentent ce jour-là. Cette stratégie qui construit la confiance devrait être répétée plusieurs fois au cours de l’année, particulièrement après que les étudiants ont exprimé de la colère ou de la frustration, et après des vacances scolaires ou de longs week-ends.

Gestion des émotions

Enseigner les émotions et les stratégies d'autorégulation

Enseignez activement et renforcer ce que les élèves font déjà pour aider à se calmer lorsqu’ils se sentent très excités ou bouleversés pour une chose ou une autre (tourner, secouer la jambe ou bouger d'un côté à l'autre, se couvrir la bouche avec la main, remuer quelque chose, etc.) Introduisez de nouvelles stratégies qui peuvent atteindre cet objectif (technique de respiration en boîte, fredonner un air, boire de l’eau glacée, faire des pompes murales, etc.) Donnez aux élèves de nombreuses occasions de pratiquer diverses stratégies et développer leur propre liste personnalisée pour s’y référer à l’avenir.

Changer de chaîne

Alors que des relations de confiance se bâtissent entre l’enseignant et l’élève, il devient plus facile d’éloigner les élèves des comportements qui nuisent à leur apprentissage. Dans le cadre d’une petite école, l’enseignant peut former toute l’école ou toute la classe à comment s’aider les uns les autres à rester concentrés sur l’apprentissage.

Parfois, dans nos petites salles de classe, il semble plus facile de séparer et isoler les élèves. Malheureusement, durant ces pauses les élèves peuvent s’attarder sur des émotions négatives, des facteurs de stress actuels, des pensées de colère ou des inquiétudes, ce qui peut être contreproductif.

Il peut être utile pour les élèves d’apprendre qu’sls peuvent « changer de chaîne » dans leur tête afin de mieux se concentrer à l’école. Expliquez que le cerveau est comme une télécommande qu’ils peuvent utiliser pour « changer de chaîne » pour les aider à se calmer. Par exemple, pour les jeunes enfants, ces activités de transfert peuvent inclure un centre d’écoute ou une activité « trouver l’image ». Pour les élèves plus âgés, vous pouvez essayer de créer un groupe de réflexion au sein de la classe, fournir des pages à colorier, ou utiliser des stratégies plus abstraites comme compter tous les objets verts dans la pièce, réciter l’alphabet à l’envers, etc.

Identifier et construire sur les forces

Bien faire une chose fournit une base pour bien faire d’autres choses. Cette stratégie se prête bien aux petites salles de classe car elle fournit à l’enseignant l’opportunité de bâtir une famille de forces.

Il est souvent facile de se concentrer sur les points faibles des élèves. Cependant, quand les élèves ses sentent utiles et appréciés, l’atmosphère change – ils se sentent encouragés à être la personne que Dieu les a destinés à être. Il est important que les étudiants fassent l’expérience de la compétence afin de développer une narration de soi plus précise et une image de soi plus positive. Nous voulons qu’ils puissent dire : « J’ai réellement aimé aider les plus jeunes à réaliser leurs travaux artistiques. Quand je serai grand, je veux aider les enfants. » Ou encore : « Je suis bon pour réparer des choses. Un jour, je pourrais être ingénieur ou mécanicien. »

Quand il faut donner une rétroaction négative, les enseignants peuvent débuter et conclure avec un commentaire positif : « 1) J’aime comment vous vous êtes souvenu… », 2) « Vous avez fait une petite erreur quand… », 3) « Bon travail pour vous remettre sur le rails quand… » « Aider les élèves à cerner leur compétence nous aide à déplacer notre énergie en tant qu'enseignants de la résolution de problèmes à l'identification et au renforcement des points forts21. »

Conclusion

La perspective tenant compte des traumatismes peut sembler accablante. Pourtant, une éducation tenant compte des traumatismes ne consiste pas en une liste d’activités, d’articles pour la salle de classe, d’un programme d’études, ou même de changer notre langage, c’est une façon d’être – une façon de nous voir nous-mêmes et les enfants que nous conduisons à travers les yeux pleins d’acceptation de Dieu.

Nous vous invitons à vous joindre à nous dans un cheminement où, ensemble, nous gardons les trois piliers de la perspective tenant compte des traumatismes constamment en vue : sécurité, connexion, et gestion des émotions. À cette fin, faites une pause chaque matin et chaque soir et demandez-vous : « Comment ai-je vu ces piliers aujourd’hui ? Comment puis-je planifier intentionnellement de les voir demain ? » Quand nous choisissons ces « lunettes », nous serons capables de créer un environnement sécuritaire pour que les enfants de n’importe quels antécédents puissent être vus et acceptés pleinement – et qu’ils soient conscients de leur valeur aux yeux de Dieu. Nous enseignerons tout en reconnaissant et gérant nos propres émotions, et, peut-être plus important encore, en cherchant à connecter intentionnellement et profondément avec chaque enfant, car c’est là que se produit la transformation.

Vous vous rappelez des enfants d’Israël qui ne pouvaient même pas entendre le message de rédemption et de libération ? Tout comme eux, nous sommes en route pour un voyage avant d’atteindre l’ultime terre promise. Moïse a conduit le peuple à travers des temps de tribulation, de ressources insuffisantes et de découragement. Et bien qu’il ait eu à faire face à la peur, la frustration, et même la colère, il s’est accroché à la main de Dieu et s’est appuyé sur Aaron et d’autres. Cherchez et soyez ouverts à vous joindre à d’autres éducateurs, non seulement pour du soutien mais aussi pour des idées de mise en œuvre pratique. En tant qu’éducateurs dans de petites écoles, nous pouvons nous associer à d’autres éducateurs dans de petites écoles en partageant des stratégies et des ressources par courriels, des séances de co-planification sur zoom, ou des séances de travail administratif. Dieu a fait chaque étape du chemin avec Moïse, at il promet de faire la même chose pour nous.

Cet article a été revu par des pairs.

Charity Garcia

Charity Garcia, Ph.D., est professeure associée de curriculum et d'instruction, et occupe également les fonctions de coordonnatrice du programme d'enseignement et directrice de l'éducation de la maternelle à la 12e année pour l'International Center for Trauma Education and Care de l'université Andrews (Berrien Springs, Michigan, États-Unis). Elle est titulaire d'une licence en enseignement secondaire (anglais et arts visuels) avec une spécialisation dans l'intégration de la foi et de l'apprentissage (Andrews University), et d'un doctorat en programmes scolaires et instruction, avec une spécialisation dans l'éducation des minorités et l'éducation urbaine (Andrews University). Son expérience en tant qu'éducatrice comprend l'enseignement au collège et au lycée dans des contextes urbains, ruraux et internationaux, dans des établissements éducatifs publics, adventistes et à but non lucratif.

Ingrid Weiss Slikkers

Ingrid Weiss Slikkers, LMSW, CCTP, CFTP, est professeure adjointe de travail social et directrice exécutive de l'International Center of Trauma Education and Care de l'université Andrews (Berrien Springs, Michigan, États-Unis). Ses expériences professionnelles comprennent de travailler en tant que thérapeute pour les enfants et les familles, en se concentrant sur les traumatismes et les pertes, et elle a travaillé avec des populations immigrées et réfugiées. Elle est une professionnelle certifiée de la traumatologie clinique, membre de l'Association internationale des professionnels du traumatisme et praticienne de l'intervention relationnelle basée sur la confiance (TBRI).

Tara Bailey

Tara Bailey, M.A., est une éducatrice expérimentée qui occupe le poste de directrice de l'Ozark Adventist School à Gentry, Arkansas, États-Unis. Elle est membre du Southwestern Union Curriculum Committee, ainsi que du North American Division Multigrade Pathways Curriculum and Practice. Elle est actuellement rédactrice du programme d'études Stepping Stones K-2 BRIDGE. Elle a travaillé en tant qu'administratrice et enseignante dans tout le pays, de la maternelle au collège. Elle est titulaire d'un certificat d'administrateur en supervision de l'enseignement.

Référence recommandée :

Charity Garcia, Ingrid Weiss et Tara Bailey, Changeons d’optique : Approches pratiques tenant compte des traumatismes pour les éducateurs, Revue d’éducation adventiste, n° 63.

NOTES ET RÉFÉRENCES

  1. Sharmeen Mahmud, “A Case Study Addressing Trauma Needs During COVID-19 Remote Learning From an Ecological Systems Theory Framework,” BMC Psychology 10:1 (2022): 141. doi.10.1186/s40359-022-00848-y; Gary W. Harper et Leah C. Neubauer, “Teaching During a Pandemic: A Model for Trauma-Informed Education and Administration,” Pedagogy in Health Promotion 7:1 (2021):14-24. doi.10.1177/2373379920965596.
  2. Vincent J. Felitti et coll., “Relationship of Childhood Abuse and Household Dysfunction to Many of the Leading Causes of Death in Adults,” American Journal of Preventive Medicine 14:4 (1e mai 1998): 245-258. doi.10.1016/s0749-3797(98)00017-8.
  3. Jenna Quinn, “3 Realms of ACEs-Updated,” Paces Connection (6 octobre 2020) : https://www.pacesconnection.com/blog/3-realms-of-aces-updated.
  4. Karyn B. Purvis, David R. Cross, et Wendy L. Sunshine, The Connected Child: Bring Hope and Healing to Your Adoptive Family (New York: McGraw-Hill Education, 2007).
  5. Monica Bucci et coll., “Toxic Stress in Children and Adolescents,” Advances in Pediatrics 63:1 (1e août 2016), 403-428.doi.10.1016/j.yapd.2016.04.002.
  6. Mayo Clinic Staff, “Chronic Stress Puts Your Health at Risk,” MayoClinic.org (8 juillet 2021): https://www.mayoclinic.org/healthy-lifestyle/stress-management/in-depth/stress/art20046037#:~:text=Cortisol%2C%20the%20primary%20stress%20hormone,fight%2Dor%2Dflight%20situation.
  7. Dan Siegel et coll., “Treating Trauma Master Series,” National Institute for the Clinical Application of Behavioral Medicine (NICABM) (n.d.): https://s3.amazonaws.com/nicabmstealthseminar/Trauma2017/confirmed/NICABMTreatingTraumaMasterSeries-Module1MainSessionNeurobiologyTrauma.pdf.
  8. Sarah Peterson, “About Child Trauma,” The National Child Traumatic Stress Network,(5 novembre 2018): https://www.nctsn.org/what-is-child-trauma/about-child-trauma.
  9. Purvis, Cross,et Sunshine, The Connected Child: Bring Hope and Healing to Your Adoptive Family.
  10. Charity Garcia et coll., “When You Get That Student: Trauma-informed Restorative Responses.” Dans Peter Kilgour et Beverly June Christian, éds., Revealing Jesus in the Learning Environment: Experiences of Christian Educators (Cooranbong, N.S.W., Australia: Avondale College Press, 2019), 101-13.
  11. Trauma and Learning Policy Initiative (TLPI), “Videos –Trauma Sensitive Schools –Safe and Supportive Schools,” Helping Traumatized Children Learn (4 septembre 2020): https://traumasensitiveschools.org/videos/.
  12. Cité par Laura Mirsky, “The Sanctuary Model: A Restorative Approach for Human Services Organizations: News,” International Institute for Restorative Practices (3 mars 2010): https://www.iirp.edu/news/the-sanctuary-model-a-restorative-approach-for-human-services-organizations.
  13. Howard Bath, “The Three Pillars of TraumaWise Care: Healing in the Other 23 Hours,” Reclaiming Children and Youth 23:4 (hiver 2015): 5-11: https://www.traumebevisst.no/kompetanseutvikling/filer/23_4_Bath3pillars.pdf.
  14. Ibid.
  15. Ellen G. White, Education (Mountain View, Calif: Pacific Press, 1903), 13.
  16. Dana Brown, “Resilience Questionnaire,” ACEs Task Force of San Bernardino County, Paces Connection (1e mars 2017): https://www.pacesconnection.com/g/san-bernardino-aces-connection/resource/resilience-questionnaire-pdf.
  17. Sandra M. Chafouleas et coll., “Addressing Childhood Trauma in School Settings: A Framework for Evidence-based Practice,” School Mental Health 11:1 (2018): 40-53.doi.10.1007/s12310-018-9256-5; Stephanie Haman, “Trauma-Informed Practices and Their Effects on Student Behaviors,” NW Commons (2021): https://nwcommons.nwciowa.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1314&context=education_masters; Satu Larson et coll., “Chronic Childhood Trauma, Mental Health, Academic Achievement, and School-based Health Center Mental Health Services,” Journal of School Health 87:9 (2017):675-686. doi.10.1111/josh.12541; Shelley M. Thomas et coll., “Trauma-informed Practices in Schools Across Two Decades: An Interdisciplinary Review of Research,” Review of Research in Education 43:1 (mars 2019): 422-452. doi.10.3102/0091732X18821123; Heidi B. Von Dohlen et coll., “Trauma-informed Practices in a Laboratory Middle School,” Middle School Journal 50:4 (2019): 6-15. doi.10.1080/00940771.2019.1650549.
  18. Bruce D. Perry et Maia Szalavitz, The Boy Who Was Raised as a Dog (New York: Basic Books, 2007).
  19. Sarah McKibben, “The Two-minute Relationship Builder,” ASCD (1ejuillet 2014) https://www.ascd.org/el/articles/the-two-minute-relationship-builder.
  20. « Le box breathing est une technique de relaxation puissante mais simple qui vise à ramener la respiration à son rythme normal après une expérience stressante. Elle peut aider à clarifier l'esprit, à détendre le corps et à améliorer la concentration. » : Medical News Today, “What Is Box Breathing?” (Mis à jour le 6 janvier 2023) https://www.medicalnewstoday.com/articles/321805.
  21. Jessica Minahan, “Trauma-informed Teaching Strategies,” Educational Leadership 77:2 (octobre 2019): 30-35: https://www.ascd.org/el/articles/trauma-informed-teaching-strategies.